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Arrêtez de penser que le monde est compliqué… il est complexe ! – par Marc Halévy – #2 les 5 ruptures

Pour comprendre pourquoi nous vivons une réelle bifurcation et si l'on peut parler de rupture ? Reportez-vous au premier chapitre publié au sujet des bases de la réflexion de Marc Halévy sur le nouveau monde socio-économique. 

Les cinq ruptures socio-économiques à maîtriser

Le processus socioéconomique humain connaît une bifurcation, c'est-à-dire une rupture majeure sur chacune de ses cinq composantes. 

La rupture écologique

La rupture écologique concerne les ressources dont l'humanité a besoin pour continuer sur son train. En moins de deux siècles, 80% des ressources non renouvelables, accumulées par la planète Terre depuis 4 milliards d'années, ont été consommés. Les ressources plus ou moins facilement accessibles, avec des rendements soutenables, n'existent plus. Il ne reste que des ressources de plus en plus inaccessibles ; le problème n'est pas l'épuisement des ressources non renouvelables, mais bien leur inaccessibilité.

 

Aujourd'hui, les ressources les plus pénuriques sont, dans l'ordre : l'eau douce, les terres arables, les énergies fossiles, les métaux non ferreux et les "terres rares" (les lanthanides) …

 

Quant aux ressources renouvelables (essentiellement, l'énergie solaire et ses dérivés végétaux, éoliens et hydroélectriques), elles ont deux caractéristiques incontournables : elles sont fortement diluées (à haute entropie) et elles se renouvellent très lentement (pour la même raison) ; ainsi, par exemple, il suffit d'une journée pour brûler une stère de bois (qui est de l'énergie solaire capturée et concentrée par photosynthèse), mais il faut quarante ans pour la reconstituer (les essences à pousse rapide que promettent les technologies agronomiques, ont un très faible rendement thermique).

 

Il n'y a jamais de miracle en thermodynamique ! Et la technologie n'y changera rien puisqu'elle est, comme le reste, entièrement soumise aux lois de la physique pour lesquelles il n'y a jamais de miracle. La technologie déplace les problèmes de ressources, mais elle ne les résout jamais ; elle ne peut pas créer quelque chose avec rien.

 

La rupture écologique, si l'on ne fait rien, nous a fait passé d'une logique d'abondance à une logique de manque généralisé et de guerre des ressources.

La rupture technologique

La rupture technologique concerne la modalité profonde des activités humaines. Il s'agit de la troisième révolution informationnelle : après le passage de l'oralité à l'écriture, puis de l'écriture à l'imprimerie, nous passons au numérique (à remarquer qu'aucune de ces révolutions n'a éliminé la précédente, mais s'y superpose). Cette révolution numérique est récente (elle a vraiment commencé au milieu des années 1960) et a progressé à très grande vitesse : 1973 : naissance de l'informatique de gestion, 1983 : arrivée des ordinateurs personnels, 1993 : émergence de la Toile (depuis le CERN à Genève), 2003 : développement des méthodes algorithmiques, 2013 : triomphe des ordiphones.

 

Les effets positifs de la révolution numérique sont nombreux comme la quasi abolition de l'espace et du temps dans la sphère humaine, la mise en contact instantanée, la libération des travaux pénibles ou inintelligents, l'accès immédiat et quasi gratuit aux savoirs et aux données, etc …

 

Mais elle a aussi ses aspects négatifs. Outre les inepties véhiculées par les mythologies transhumanistes et les impostures de la soi-disant "intelligence artificielle" (une fleur artificielle n'est pas une fleur !), le plus grand danger vient du triomphe de l'audiovisuel sur le textuel car l'audiovisuel met la pensée en mode passif et déshabitue de penser par soi-même, ce qui induit le risque d'une crétinisation massive de l'humanité, plus ou moins préméditée par certaines "élites" technologiques.

 

La rupture technologique, si l'on ne fait rien, nous a fait passé d'une logique mécanique à des délires numériques.

La rupture économique

La rupture économique concerne la culture et les valeurs économiques de base. Le modèle encore aujourd'hui largement dominant, est le modèle issu de la révolution industrielle du début du 19ème siècle. Cette révolution industrielle a marginalisé le modèle artisanal et paysan antérieur, et a été très vite accueillie, développée et théorisée aux Etats-Unis, essentiellement, durant tout le 20ème siècle. Ce modèle repose sur deux piliers majeurs : les effets de taille et la baisse des prix de revient. Le second pilier induit le premier qui accélère le second : ce cercle vertueux a été alimenté par la montée en puissance de la finance qui a su capturer les capitaux nécessaires aux investissements nécessités par les économies d'échelle. Ce modèle est donc appelé "financiaro-industriel" ou "capitaliste" ou "ultra-libéral" (même si ces deux dernières appellations sont techniquement erronées et idéologiquement connotées).

 

Vers la fin du 20ème siècle, ce modèle financiaro-industriel a atteint ses limites sur deux plans. Le premier est le développement exponentiel d'une finance purement spéculative, complètement hors-sol, déconnectée de l'économie réelle qui, aujourd'hui, règne follement sur toute la sphère économique et politique (les endettements souverains inféodent complètement les Etats à la finance spéculative alimentée en liquidités gratuites par les banques centrales).

 

La seconde limite fut atteinte dès lors que le dernier domaine où les prix de revient pouvaient encore être abaissés, fut celui de la qualité (celle des produits, des matières, des procédés, des main-d'œuvre, etc …). La grande distribution, l'industrie agro-alimentaire, l'industrie vestimentaire et de mode, les industries des médias, des loisirs, les industries pharmaceutiques, cosmétiques et chimiques, etc … furent les grands moteurs de ce dévoiement.

 

La rupture économique, si l'on ne fait rien, nous a fait passé d'une logique financiaro-industrielle à une logique d'appauvrissement qualitatif et quantitatif.

La rupture sociologique

La rupture sociologique concerne les organisations et modes de structuration tant des sociétés que des communautés de vie et de travail. Le modèle ancestral est la pyramide hiérarchique. Ce modèle vise une organisation la moins coûteuse possible en matière d'énergie humaine. Elle repose, mathématiquement, sur la minimisation du nombre de relations entre les acteurs. Une telle organisation peut très bien fonctionner et être efficace à la condition expresse que l'univers dans lequel elle opère, soit stable, tranquille et prévisible.

 

Aujourd'hui, plus rien de tel ; l'univers humain est devenu instable, effervescent et imprévisible du fait de l'incroyable montée en complexité, en étendue et en célérité des activités humaines. Cette montée en complexité étant à la fois durable et irréversible, les modèles d'organisation humaine ont le choix : ou bien accepter de changer de modèle organisationnel, ou bien s'obstiner sur le mode pyramidal hiérarchique au prix d'une sclérose généralisé qui rend incapable d'assumer et de challenger la montée en complexité et qui condamne le monde humain à la bureaucratie inefficace (ce qui est pléonastique).

 

La rupture sociologique, si l'on ne fait rien, nous a fait passer d'une logique pyramidale efficace à une logique bureaucratique sclérosée et inefficiente.

La rupture éthologique

La rupture éthologique concerne le projet qui anime l'évolution des humains sur Terre. La modernité, née à la Renaissance avec les penseurs "humanistes", avait remis l'homme au centre de la scène philosophique. Tout le paradigme moderne est construit sur cet anthropocentrisme. La "religion" moderne est celle du "progrès", c'est-à-dire celle de la "libération" de l'homme de toutes les entraves naturelles, climatiques, biologiques, sexuelles, religieuses, politiques ou noétiques dont l'histoire l'avait chargé.

 

A l'humanisme du 16ème siècle, succéda le rationalisme du 17ème, le criticisme du 18ème (mieux connu sous le nom des "Lumières"), du positivisme du 19ème jusqu'à aboutir au nihilisme du 20ème siècle. En gros, l'homme est enfin libre de tout. Certes, mais "libre pour quoi faire ?" questionnait Nietzsche. Toutes les réponses qui avaient été construites au fil des millénaires par les paradigmes pré-modernes, sont devenues inaudibles.

 

La seule chose qui pouvait encore compter, était de "réussir dans la vie" ; réussite matérielle, surtout, cela va sans dire. Réussir dans le vie, cela signifie "réussir" dans le paraître et l'avoir, "réussir" dans le regard des autres, "réussir" à monter le long de l'échelle sociale.

 

Les horreurs inimaginables de la seconde guerre mondiale et la seconde moitié du 20ème siècle laissèrent l'humanité pantelante, abasourdie, groggy. Il ne resta plus rien en quoi croire, en quoi vouloir, en quoi espérer (c'est cela le nihilisme). Il ne resta plus que la fuite dans les paradis artificiels ou virtuels, et l'hédonisme débridé (l'escalade amère dans la recherche insatiable des plaisirs).

 

Les modes du culte de soi et de sa propre image (jeunisme, chirurgie "esthétique", piercings, tatouages, travestissements, rasures et sculptures capillaires, …) témoignent à suffisance de ce narcissisme et de ce nombrilisme ambiants.

 

La rupture éthologique, si l'on ne fait rien, nous fait passer d'une logique de la réussite à une logique de l'hyper-individualisme.

La rupture éthologique concerne le projet qui anime l'évolution des humains sur Terre. La modernité, née à la Renaissance avec les penseurs "humanistes", avait remis l'homme au centre de la scène philosophique. Tout le paradigme moderne est construit sur cet anthropocentrisme. La "religion" moderne est celle du "progrès", c'est-à-dire celle de la "libération" de l'homme de toutes les entraves naturelles, climatiques, biologiques, sexuelles, religieuses, politiques ou noétiques dont l'histoire l'avait chargé.

 

A l'humanisme du 16ème siècle, succéda le rationalisme du 17ème, le criticisme du 18ème (mieux connu sous le nom des "Lumières"), du positivisme du 19ème jusqu'à aboutir au nihilisme du 20ème siècle. En gros, l'homme est enfin libre de tout. Certes, mais "libre pour quoi faire ?" questionnait Nietzsche. Toutes les réponses qui avaient été construites au fil des millénaires par les paradigmes pré-modernes, sont devenues inaudibles.

 

La seule chose qui pouvait encore compter, était de "réussir dans la vie" ; réussite matérielle, surtout, cela va sans dire. Réussir dans le vie, cela signifie "réussir" dans le paraître et l'avoir, "réussir" dans le regard des autres, "réussir" à monter le long de l'échelle sociale.

 

Les horreurs inimaginables de la seconde guerre mondiale et la seconde moitié du 20ème siècle laissèrent l'humanité pantelante, abasourdie, groggy. Il ne resta plus rien en quoi croire, en quoi vouloir, en quoi espérer (c'est cela le nihilisme). Il ne resta plus que la fuite dans les paradis artificiels ou virtuels, et l'hédonisme débridé (l'escalade amère dans la recherche insatiable des plaisirs).

 

Les modes du culte de soi et de sa propre image (jeunisme, chirurgie "esthétique", piercings, tatouages, travestissements, rasures et sculptures capillaires, …) témoignent à suffisance de ce narcissisme et de ce nombrilisme ambiants.

 

La rupture éthologique, si l'on ne fait rien, nous fait passer d'une logique de la réussite à une logique de l'hyper-individualisme.